Coup de Gueule !

J’ai eu envie d’exprimer mon ressentiment face à des actes répréhensibles envers les journalistes !

Ça suffit !

 

Je me lève ce matin et comme tous les matins, avec mon café noir, je commence à lire la presse traditionnelle, la presse indépendante et je fais un p’tit tour sur les différents réseaux sociaux GAFA et libres. Je m’informe quoi !
Et là, j’ai la moutarde qui me monte au nez (pour rester polie, hein ! parce que là, ça commence à me chauffer grave !). Depuis plusieurs jours, l’affaire Morgan Large – une consoeur journaliste – fait le buzz sur l’info dans les réseaux indépendants. Et c’est tout à fait normal qu’on en parle !
Seulement, dans la presse traditionnelle, bah, on en parle pas beaucoup ! Et c’est là que le bât blesse !

Il arrive des choses totalement graves envers les journalistes qui font bien leur boulot !
Hé ! Les gens, réveillez-vous !

Inès Léraud

 

Inès Léraud, journaliste, fait une investigation sur les algues vertes en Bretagne et expose de gros soucis de pollution lié à l’agriculture intensive qui empoisonnent le paysage breton sur les côtes. Elle dénonce les responsabilités de chacun, que ce soit les industriels, les agriculteurs et les élus. Mais, elle ne fait pas ça à la légère, hein, elle travaille, cherche et se base sur des sources fiables : L’INRA, le CNRS et l’IFREMER affirment que la cause de la présence des algues vertes est l’agriculture intensive. Elle fait son taf quoi ! Le boulot d’un journaliste d’investigation.
Et là, bam ! Elle se retrouve avec un procès en diffamation pour son enquête. Christian Buson (directeur du GES, un institut privé de conseil en environnement qui conseille les agro-industries) retire sa plainte 3 jours avant le procès.

Plus tard, elle enquête sur le Groupe Chéritel, entreprise agro-alimentaire basée à Guingamp et l’article paraît chez Bastamag (Média indépendant d’information en ligne sur l’actualité écologique et sociale). Ce grossiste a déjà été condamné à six reprises pour fraudes, emplois illégaux, et j’en passe ! 
Et là, rebelote ! Inès écope d’un 2nd procès pour diffamation !
A quelques jours du procès, on remet ça ! Le groupe Chéritel se rétracte et retire sa plainte.

Je vous en avais déjà parlé dans un autre de mes articles :
Pour ces entreprises agro-industrielles, le fait d’intenter des procès et de se rétracter quelques jours avant, est un procédé récurrent. Cela leur permet d’intimider les journalistes indépendants et de les forcer à se tenir tranquilles. En effet, pendant que les journalistes travaillent sur leur défense, ils ne vont plus mettre le nez dans les magouilles de ces grandes entreprises ! Ils visent à faire taire la presse indépendante.
On appelle ça les “Procès Baillons”. 
 

 (Photo Amélie Dagman)

Morgan Large

Morgan est Journaliste à RKB (Radio Kreizh Breizh) à Rostrenen. C’est une radio de pays bilingue Français/Breton créée en 1983. Journaliste d’investigation spécialisée dans les dérives de l’agro-industrie en Bretagne, elle dérange et est victime de menaces et d’intimidations. À la suite de son témoignage dans “Bretagne, une terre sacrifiée”, le documentaire d’Aude Rouaux et Marie Garreau de Labarre, diffusé sur France 5 le 17 novembre dernier, où Morgan dénonçait l’intensification de l’agriculture, les menaces se sont faites plus vivaces.
On a empoisonné son chien, elle reçoit des coups de fils anonymes la nuit et même la radio pour laquelle elle travaille a été victime de dégradations !
Fin mars, elle est victime d’un sabotage grave de sa voiture : on a déboulonné sa roue ! Là, on passe à un stade plus élevé des menaces car, il s’agit d’attenter, cette fois, à sa sécurité et à celle de sa famille !

Ce sont des actes inadmissibles qui visent à empêcher Morgan de faire son travail de journaliste.
Une plainte a été déposée et RSF (Reporters Sans Frontières) demande une protection policière pour Morgan.

Une Consœur Allemande

 

Une journaliste allemande prépare un sujet sur les élections en Bretagne et se rend à Glomel pour rencontrer Morgan. Elle se fait agresser par un agriculteur qui finit par la rejoindre à son auberge accompagné de 2 gendarmes ! Elle est sommée d’effacer son enregistrement audio par ces mêmes gendarmes !
La Cellule Démeter ! Encore un autre souci qui empêche les journalistes de pouvoir travailler !
La “Cellule nationale de suivi des atteintes au monde agricole” (cellule Déméter) est créée en 2019 par le gouvernement et 2 syndicats agricoles (La FNSEA et les JA) pour régler les problématiques de sécurité qui touchent le monde agricole et lutter contre l’agribashing.
Mais cette cellule inquiète car elle dénigre tous ceux qui militent contre une agriculture intensive.

 

On en revient toujours au même principe : faire taire les journalistes lanceurs d’alerte qui fourrent un peu trop leur nez dans les affaires de l’agro-industrie bretonne ! Seulement, ils font simplement leur travail !
Mais qu’est-ce que le journalisme, au fait ?
Le journalisme est l’activité qui consiste à recueillir, vérifier et éventuellement commenter des faits pour les porter à l’attention du public dans les médias en respectant une même déontologie du journalisme. (Wikipédia)

Inès, Morgan et d’autres ne font donc que leur métier. Mais cela tend à devenir dangereux ! Et c’est cela que je ne peux accepter ! Il est intolérable que faire son travail devienne une source de menaces et d’actes graves de malveillance qui peuvent mettre sa vie en danger !

La loi de sécurité globale

Cette loi, qui porte atteinte à la liberté de la presse, à la liberté d’information, à la liberté d’être informé et à la liberté d’expression a été définitivement adoptée par l’Assemblée Nationale le 15 avril dernier.
C’est une difficulté de plus pour que les journalistes puissent continuer à travailler correctement.
Même si cette loi doit encore passer devant le Conseil Constitutionnel, rien que le fait qu’elle ait été proposée et votée nous montre que le gouvernement et les lobbies associés redoutent le travail des journalistes d’investigation et que d’une manière ou d’une autre, il faut absolument restreindre leur liberté  d’expression !

Ces actes de malveillance envers les journalistes sont trop peu relayés ! Nous devons, nous autres journalistes, nous serrer les coudes face à ces intimidations et menaces que représentent l’agro-industrie et la loi de sécurité globale.
Le collectif Kelaouiñ est un collectif de journalistes qui militent pour la défense de la liberté d’informer face aux enjeux de l’agro-industrie. Kelaouiñ signifie “informer” en breton.
De même, Splann ! est une ONG d’enquêtes journalistiques bilingue en Bretagne créée pour permettre de donner les moyens et le temps aux journalistes d’enquêter sans pression ni censure, sur des investigations riches et complexes sur notre territoire : La Bretagne. Splann ! signifie “clair” en breton.

Le Canard Réfractaire s’associe au soutien de nos consœurs menacées dans l’exercice de leur fonction. Nous condamnons les actes de malveillance à leur encontre et nous assurons notre soutien au Collectif Kelaouiñ et à l’ONG Splann !

Nous portons la défense de la liberté d’informer, d’expression et la liberté de la presse haut et fort dans nos cœurs !

 

Myriam Pommelec – Avril 2021